Mi pecho recalienta la sombra de la ventana, la ciudad se despierta a mi llamado y se alarga sobre el caos de mis noches. Al alba, cuando la luz se endurece, la infancia vuelve. Al alba siempre el agua fluye como la muerte pues no hay aquí piano ni voz como la tuya para cantar al horizonte de antaño. El mar ya está lejos. no hay que abatirse, no hay que aullar. Voy a descender hasta ti en calma, remontar mi garganta e inventar gritos para revivir mi partida. Extenderé el aceite de nuestro duelo sobre el cielo de Bagdad, sobre sus callejuelas, las marcaré con mis lágrimas sin palabras. olvidando mi virilidad, inventaré el lenguaje que sitia a los soldados con sus carros, sus victorias y sus banderas con tantas estrellas como tumbas. Acallaré este horror, sacaré al tigre de la fosa común, lo liberaré de sus asesinos —resistentes, antaño cómplices del invasor, de esos buitres que siegan las piernas de los chiquillos. Lo arrastraré en la escritura hasta mi refugio, hasta el osario de las palabras. Entonces pensaré en ti al escuchar la risa de un niño sobre un columpio, en nuestra recámara naranja, en el ramo de flores de lis marchito sobre el armario, y las estrellas hilarán en el tintero.
Bagdad, 19 de marzo de 2004
Versión de Coral Aguirre
Ma poitrine réchauffe l’ombre de la fenêtre, la ville se réveille
à mon appel et s’allonge sur mes nuits en vrac. A l’aube,
quand la lumière s’endurcit, l’enfance revient. Toujours à
l’aube l’eau coule comme la mort car il n’y pas de piano
ici ni de voix comme la tienne pour chanter l’horizon
d’autrefois. La mer est déjà loin.
Il ne faut pas s’effondrer, il ne faut pas hurler.
Calmement je vais descendre jusqu’à toi, arpenter ma gorge
et inventer des cris pour revivre mon départ. Je répandrai
l’huile de notre deuil sur le ciel de Bagdad, sur ses ruelles,
les baliserai avec mes larmes sans paroles.
Oubliant ma virilité, j’inventerai le langage qui encercle
les soldats avec leurs chars, leurs victoires et leurs drapeaux
étoilés de tombes. Je ferai taire cette horreur, je sortirai
le Tigre de la fosse commune, le libérerai de ces assassins
— résistants, autrefois complices de l’envahisseur, de ses
vautours qui fauchent les jambes des gamins. Je le traînerai
dans l’écriture jusqu’à mon refuge, jusqu’aux charniers des
mots.
Alors je penserai à toi en entendant le rire d’un enfant sur
une balançoire, à notre chambre orange, au bouquet de lys
séché sur l’armoire, et les étoiles fileront dans l’encrier.
Bagdad 19 mars 2004